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Trente sept années d'interactions avec Jacques-Louis Lions ne sauraient se résumer en quelques lignes. Je donne seulement quelques images qui me viennent à l'esprit.
Tout d'abord, la forte impression que laissent sa personnalité et sa carrière scientifique exceptionnelles dont il est question par ailleurs dans ce volume.
Sur un plan plus personnel il y a le professeur qui m'a initié à la recherche ; puis, tout au long des années, le collègue, ami et maître, que je consultais pour avoir un avis ; de longues discussions, face à face ou au téléphone, sur la science ou sur des sujets divers ; les voyages pour des destinations proches ou lointaines avec beaucoup d'aventures drôles ou intéressantes ; la collaboration intensive des années 90 ; l'humour qu'il savait introduire même dans des situations sérieuses ou graves ; son amitié et sa fidélité en amitié ; beaucoup de choses qui ont rendu la vie mathématique encore plus agréable et passionnante.
Un des traits les plus marquants de sa personnalité scientifique était la faculté qu'il avait de voir le futur. Grâce à cela il était souvent en avance sur les autres, il a su pressentir des développements, et il s'est impliqué dans des projets dix, vingt ou trente ans avant tout le monde. C'est un des faits que je retiens de ma première entrevue avec lui et de la dernière longue conversation scientifique que j'ai eue avec lui.
Agé de 24 ans, ne connaissant rien aux edp ni à l'analyse numérique, je suis allé le voir à la fin du mois de juin 1964. Il m'avait donné rendez-vous chez lui rue du Hameau - les professeurs n'avaient pas de bureau à l'Université à l'époque. Il m'a donné à lire son cours de Montréal, précurseur du Lions-Magenes, et il m'a parlé de choses que je n'ai pas comprises sur le moment, mais qui sont arrivées à maturité quinze ans après.
Ma dernière longue conversation scientifique avec lui -par téléphone- a eu lieu en juin 2000 et tournait autour des mathématiques du siècle nouveau. En liaison avec la création du prix Clay, il m'a offert ses idées sur les mathématiques du XXIème siècle. Je ne sais plus s'il me les a offertes spontanément ou en réponse à des questions. En l'écoutant, je réalisais que je n'avais aucune idée de l'édifice mathématique qui pourra un jour héberger les problèmes qu'il voyait. Néanmoins j'étais et je suis convaincu que ses idées feront partie de la science mathématique dans vingt, trente ou quarante ans.
Deux textes plus substantiels sur Jacques-Louis Lions écrits par
R. Temam paraîtront dans les Notices de l'AMS et dans SIAM News.
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Témoignage parus dans
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MATAPLI 66 (octobre 2001) pages 17-41.
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